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bernard réquichot

À SAVOIR :

La plupart des œuvres de Bernard Réquichot que nous présentons proviennent de la collection de Daniel Cordier, devenu proche de la galerie. Il nous a choisi pour reprendre le flambeau de cette œuvre importante, complexe, en avance sur son temps et rare.

Hormis une donation importante au Centre Pompidou, Cordier gardait jalousement ses Réquichot.

L’artiste s’est suicidé l’avant-veille d’une grande exposition dans sa galerie en 1961. Il avait 33 ans. Ça aurait du être un triomphe, m’a dit Daniel, la gorge nouée.

Cordier ferme sa galerie en 1964. Depuis : un catalogue raisonné, préfacé par Roland Barthes en 1971 ; deux expositions, au musée des Sables-d’Olonne et à l’abbaye de Tanlay ; la présentation de quelques œuvres, parfois une salle entière, dans les collections permanentes du Centre Pompidou.

En 2019, Jean François Chevrier a écrit un livre qui permet mieux appréhender sa démarche et son œuvre (« Zones sensibles » chez Flammarion). Nous avons organisé plusieurs expositions à la galerie qui ont commencé à rencontrer un public français, international et institutionnel.

Pourquoi un tel retard dans la compréhension de son œuvre ?
Les correspondances avec la « beat generation » de Californie sont frappantes mais dans les années 50, le monde de la peinture en France était enfermé dans une vision trop hexagonale pour le remarquer.

La multiplicité des voies qu’il a explorées parallèlement de 1955 à 1961 a dérouté, jusqu’à ce que Gerhardt Richter, puis d’autres, aient la même pratique.

Surtout Réquichot, à l’inverse de beaucoup d’artistes qui participaient activement à leur promotion dans les années 50, ne voulait rien montrer. Par goût proustien des joies de l’esprit dans la solitude, par peur de commentaires qui pourraient fausser sa création, peut-être aussi pour cacher un grave traumatisme subi dans son enfance ?

Sa défenestration l’avant-veille d’une grande exposition n’est sans doute pas un hasard. Il s’est caché, a caché certaines de ses œuvres les plus importantes, l’a dit sous forme de masques et d’écritures illisibles, a créé des formes universelles à compréhension différée pour les générations futures.

Bernard Réquichot a nourri ses œuvres à la fois des avancées de la science à son époque (sur le big bang, le temps, les radiations, la physique quantique…) et de la fébrilité de ses mécanismes mentaux, qui affleurent dans ses Guerre des nerfs et beaucoup de dessins. Il a recherché « une fusion de la science, de la joie, de l’art et de l’être », des correspondances entre l’infiniment petit, dont le plus ténu de sa vie psychique, et le macrocosme de ses traces graphiques ou ses ciels prolifiques.

Dans la plus grande discrétion, Réquichot a innové formellement, et participé au renouveau des arts plastiques : mixtes de collages, peintures et dessins ; renouveau du collage en découpant et détournant des photos de magazine suivant des principes baroques de répétition-variations et en collant des fragments de peinture sur des toiles ou des dessins ; traces graphiques, reliquaires ; toiles pliées transformées en sculptures, sculptures d’anneaux… « Chaque chose peut évoquer beaucoup d’autres choses selon la manière de la voir. Chaque image est l’image d’une infinité d’images. » Beaucoup de ses formes, se livrent à des interprétations sans fin.

Le Musée national dArt moderne organise sa première exposition individuelle en 2024, du 2 avril à fin août. Commissaire de l’exposition : Christian Briend.

EXPOSITIONS PRINCIPALES

1955 Première exposition personnelle à la Galerie Lucien Durand, Paris

1957 Exposition personnelle à la Galerie Daniel Cordier, Paris

1961 Exposition personnelle à la Galerie Daniel Cordier, Paris

1973 « Rétrospective », Centre National d’Art Contemporain (CNAC), Paris

1977 « Bernard Réquichot : 1929-1961 », Musée de l’Abbaye Sainte-Croix, Les Sables d’Olonne

1992 « Hommage à Bernard Réquichot », Centre d’art contemporain, Château de Tanlay, Yonne

2019 « A la découverte de Bernard Réquichot », Galerie Alain Margaron, Paris

1989 « Donations Daniel Cordier », Centre Pompidou, Paris

1995 « Passions privées, collection Daniel Cordier », Centre Pompidou

1997 « Made in France : 1947-1997. Cinquante ans de création en France », Centre Pompidou, Paris

2002 « Dado-Réquichot, la guerre des nerfs », Musée des Abattoirs, Toulouse

2002 « Paris, Capital of Arts, 1900-1968 », Royal Academy of Arts, Londres

2002 « Paris, Capital of Arts, 1900-1968 », Musée Guggenheim, Bilbao

2003 « Roland Barthes », Centre Pompidou, Paris

2005 « Big Bang. Destruction et création dans l’art du XXe siècle », Centre Pompidou, Paris

2009 « Les désordres du plaisir », Centre Pompidou, Paris

2012 « Collection Michael Werner », Musée d’Art Moderne de Paris, Paris

2019 « Galeries du XXe siècle », Centre Pompidou, Paris

2020 « Le rêveur de la forêt », Musée Zadkine, Paris