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Panorama de coquillages

Bernard Réquichot, "Panorama de coquillages", 1954, huile sur toile, 33 x 46 cm

La découverte d’une œuvre de Réquichot est rare. Le Panorama de coquillages, de 1954, n’était pas répertorié dans le catalogue raisonné de 1971 préfacé par Roland Barthes. Il a tout pour surprendre. Les couleurs sont attrayantes alors que la plupart de ses peintures en 1954 sont obscures. L’une d’elles s’appelle d’ailleurs Le rêve se cultive dans les ténèbres.

Ce « Panorama » est un paysage mental, au plus près des mécanismes mentaux de l’artiste. Derrière son apparente simplicité, se dévoilent des pistes pour commencer à comprendre l’un des œuvres les plus mystérieux, complexes et puissants des années 50, en avance d’une décennie.

Admirateur de Paul Valery, Réquichot a manifestement lu L’homme à la coquille, de 1937, sur les émotions et l’émerveillement de la vie intellectuelle.

Des masses sombres, du marron au noir, s’emmêlent à une vivacité brique ou rouge. La peinture est épaisse, souple et brillante. Elle est rythmée de nervures de coquillages que Réquichot transmute en muqueuses.

Nous voici dans un monde onirique où les équivalences ont force d’évidence. Mondes intérieur et extérieur fusionnent sur écran organique.

La composition s’anime, entoure d’une animalité inquiétante les chemins rouges qui s’entrouvrent. Apparaît peut-être, en bas à droite, un loup noir, entre des fragments étirés de monstres pré-historiques ; puis, une montagne sombre se déploie en oiseau de proie ; plus haut encore, un coin de paysage plus accueillant, ouvert et clos.

On pense aux écrits de l’artiste : À mesure que je m’enfonce dans le passé, un inconnu en moi grandit : je m’en vais à la Préhistoire…
Le dedans crée le dehors, le dehors crée le dedans, l’un vient réciproquement de l’autre et devient comme l’autre…Cette analogie involontaire peut-elle s’appeler figuration ? L’analogie n’est pas figuration : figuratives sont les images d’un monde qui existe ou d’un monde qui pourrait être. Abstraites sont les images d’un monde qui ne peut exister.

L’œuvre est rythmée par un jeu de pulsions-répulsions, d’attirances et de rejets, que Bernard Réquichot développera dans ses Guerres des nerfs, trois ans plus tard.

A. M.

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