Jean Hélion

"Mon métier est de penser avec les yeux"

Jean Hélion Galerie Alain Margaron Jean Helion peintre
Jean Hélion, "Chou sous la lucarne", 1960, huile sur toile, 120 x 79 cm

La période que nous avons choisie est la moins connue. Hélion nourrissait alors, une grande ambition : enrichir son langage pictural à la fois de son abstraction géométrique des années 30 et de l’abstraction douce, aux formes courbes, dite lyrique, comme celle de son ami, Hans Hartung, sans se soucier des clans qui se sont livrés une guerre fratricide.

« À Belle-Île en mer, où il possède une maison depuis 1953, Hélion trouve des motifs qui lui permettent d’inscrire dans le réel, la célérité, la gestualité de l’art abstrait lyrique… Autant ses peintures des toits de Paris procèdent d’une technique qui privilégie les aplats, conduit à la disparition de la touche, autant ses tableaux de Belle-Île recourent à une écriture rapide, imposent un mouvement de la brosse qui, seul, est à même de restituer le mouvement des vagues, la forme des roches déchiquetées », analyse Didier Ottinger, commissaire de sa dernière grande exposition, au Centre Pompidou, en 2004.

Hélion poursuivait son œuvre dans l’indifférence du public et des marchands, refusant toute bannière, et donc tout soutien durable, continuant à évoluer parce que son œuvre l’exigeait.

Et ses sujets heurtaient le bon goût. Quoi de plus banal et de moins flatteur qu’une vue de toits, un chou dans une chambre de bonne, des mareyeurs qui se passent des paniers ou un képi fatigué ? Un regard superficiel a pu voir des chromos dans des œuvres complexes et sophistiquées.

Il faut du temps pour que la beauté d’une œuvre soit reconnue. Un succès plus rapide n’est souvent que celui du sujet traité.

Hélion a été, certes, soutenu par les grands écrivains de son époque : Ponge, Queneau, Char, Du Bouchet, Bonnefoy

« Grâce à Hélion, tout d’un coup, on s’exclame : comme c’est beau ! Oui, c’est beau les toits, les charrues, les citrouilles… tout ce que le peintre choisit pour nous apprendre à le voir. » Robert Queneau

« Aucun de ces tableaux présente le moindre charme, la moindre trace de goût. Mais chacun possède un incontestable pouvoir hypnotique ; on ne s’en détache pas facilement. » Francis Ponge

Il était, également aimé des artistes : « Fasciné par les productions de ce peintre, je ne peux qu’à grand peine en détacher mon regard. » Alberto Giacometti

Les institutions n’étaient pas en reste. À la demande de Blaise Gautier, directeur du Centre National d’art contemporain, Daniel Abadie lui a consacré la première rétrospective d’un artiste vivant au Grand Palais, en 1970. Plusieurs des œuvres que nous exposons étaient accrochées. Des expositions institutionnelles importantes se sont ensuite succédées.

Mais Hélion n’était toujours pas dans l’air du temps. Ajoutons à cela certains comportements contre-productifs de ceux qui auraient du soutenir son œuvre…

Les choses ont commencé à changer. Le public des amateurs de Jean Hélion s’élargit. Et son importance apparaît. Son œuvre préfigure le retour actuel à la figuration et donne des clefs pour une quête du réel. Elle donne aussi une grande leçon de liberté par rapport aux attentes du marché et aux idées en cours. Cette liberté a un prix. Le succès n’est pas immédiat.

A.M.

L’exposition Jean Hélion est prolongée, avec un accrochage renouvelé, jusqu’au 29 mai dans l’espace – cour.

À l’occasion de cette exposition nous avons édité l’étude de Henry-Claude Cousseau, De dessins en desseins, étoffée d’une préface analytique et d’une iconographie élargie, dont beaucoup d’œuvres inédites accrochées actuellement.

Le jardin bleu, 1966, huile sur toile, 92 x 65 cm - exposé au Grand Palais en 1970
Le jardin bleu, 1966, huile sur toile, 92 x 65 cm - exposé au Grand Palais en 1970
Jean Hélion, Feuilles de chataigners, 1956, huile sur toile, 82 x 130 cm
Jean Hélion, Feuilles de chataigniers, 1956, huile sur toile, 82 x 130 cm
Jean Hélion, "Vanité", 1958, huile sur toile, 64 x 49 cm
Tableau de Jean Hélion
Jean Hélion, « Accordéon pour deux passants », 1965, huile sur toile, 88,5 x 130 cm
Jean Hélion, Le brabant, 1957, huile sur toile, 38,6 x 24,3 cm

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