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Propos d’artiste

Fred Deux, Sans titre, 2013, encre de Chine sur papier, 58 x 38 cm

Fred Deux, en 2012-2013, à l’atelier devant ses dernières œuvres, parlait difficilement. Il m’arrivait de compléter ses phrases, j’attendais alors son approbation. Cela nous permettait d’avancer, à moi de mieux comprendre, à lui d’analyser la gestation de ses nouvelles oeuvres, dictées par les couleurs.

C’est bizarre, ça me parle, je cherche, désespère puis tout d’un coup quelque chose surgit, une forme figurative, visage, jambe, animal ou bien une tâche, parfois malencontreuse, tombée de la plume, ou bien l’encrier renversé, et ça marche. Le dessin est relancé. Espérons que ça va durer.

Je ne sais ce que ce dessin va devenir comme je ne sais pas dans la vie. A un moment, j’ai été perdu… Puis j’ai fait un visage, c’est lui qui m’a permis de finir. J’ai été surpris. Il ne fallait pas que je déraille, c’était lui, je l’ai revu huit jours après.

Les couleurs dictent quelque chose.Du vert, du rouge? Il y avait un sens, il fallait que ça aboutisse, je travaillais sur un autre dessin, reprenais, ça ne va toujours pas? Si, il ne faut jamais être pressé.

Entre le dessin, la chose, et la chose que je veux faire, c’est foutu, me disais-je. Il fallait que je fasse cette tâche. Tout d’un coup l’oeuvre vit, allez savoir, elle vit, c’est mystérieux, à la limite c’est un peu angoissant.

Je me suis arrêté là où il fallait. Ça m’a plu, je l’aime. Ça me prend, m’amène vers un futur un peu curieux, un futur où il y a encore des animaux, des corps, de la vie.

Mes dessins, y compris, ces peintures-dessins ont toujours représenté le fonds de ma pensée. Il faut se taire. Je crois que je vois l’essentiel. Une part de désespérance (pas de désespoir), la désespérance parfois, c’est utile.

Les dernières œuvres de Fred Deux moins organiques, plus ouvertes sur la nature, affrontent le temps qui s’accélère avec l’âge . Elles donnent forme aussi bien à des ascensions relativement sereines, qu’à des rapts qui déracinent. Parfois aussi des utérus-cosmos serpentins ramènent avant la naissance.

Les couleurs, rouge encore gluant, bleu apaisant de la nuit, roses, fuchsias, jaunes printaniers et sacrés, guident sa main, se divisent elles-mêmes, parfois, en dessins.

Dans l’oeuvre ultime reproduite ci-dessus, rouges et jaunes irriguent un filet de maillages qui retient des traces de visages et de silhouettes.

A.M.

Fred Deux, "L'héritage à la fin", 2008, encres, crayon et pastel sur papier, 52 x 36 cm

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