La peinture dans les années 60

Jean Hélion, "Autoportrait", 1959, huile sur toile, 46 x 55 cm

L’ isolement des artistes que nous montrons n’a pas empêché une certaine convergence de leurs démarches. À cet égard, l’accueil réservé à Godeg que j’ai découvert à Berlin, au hasard de la ville, est exemplaire. Duvillier m’écrit aussitôt qu’il s’agit d’un artiste majeur. Fred Deux ne se séparera jamais d’une de ses œuvres importantes. Une artiste plus jeune, Hong InSook, sensible à ses effets de matière, en gardera dans son atelier.

Des rapprochements étaient à priori évident, entre Dado, Fred Deux, Macréau, Lunven pour son œuvre en noir et blanc et Réquichot. Mais avec des abstraits comme Laubiès, ou Duvillier?

Et qu’est ce qui permet à un artiste « naïf » comme Boix-Vives qui ne s’inscrit pas dans l’histoire de l’art de cohabiter avec un artiste historique comme Jean Hélion, et à celui-ci, peintre solaire, de dialoguer avec un artiste introverti comme Réquichot?

Le premier trait commun de tous ces artistes est qu’ils préservent pour celui qui les regarde un espace de liberté. Même Boix-Vives nourrit notre imagination avec le recul d’un conteur.

Je les ai choisis parce qu’ils ne nous imposent pas directement leur vision. Leurs peintures et dessins passent par le filtre d’une composition et de formes à décrypter qui engagent au dialogue.

Ces œuvres, qui pour la plupart étaient hors mode à leur époque, et encore plus dans les années 90 quand j’ai ouvert la galerie, ont, me semble-t-il, un autre trait commun : elles nous surprennent et nous interrogent toujours.

D’où la question qu’aurait posée Marcel Proust et qui reste d’actualité : peut-il exister des créations durables, qui permettent de mieux nous connaître, de vivre plus intensément, qui rejoignent leur époque en profondeur et la dépassent, sans un certain isolement dans la solitude de son atelier? Et ne faut-il pas souvent du temps pour que de telles œuvres soient comprises et aimées?

A.M.

Bernard Réquichot, "Les champignons regardent sur le seuil de l'oreille", 1960, encre au crayon à bille sur papier, 74 x 53 cm

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