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À la découverte de François Lunven 3/3

François Lunven, Sans titre, circa 1964, dessin stylo bille, 33,5 x 40 cm

La vive intelligence de François Lunven séduisait ses amis, même les plus exigeants comme Bernard Noël. Il cachait la profondeur de sa pensée derrière des joutes intellectuelles où il amenait ses interlocuteurs sur des chemins inconnus, heureux de les mystifier.

Il a laissé très peu d’écrits, tout au plus quelques lettres et la préface du Château d’Argol de Julien Gracq qu’il a illustrée d’une quinzaine de gravures.

Son goût des rapprochements inattendus, sa grande culture, sa connaissance aussi bien des rites religieux de nombreuses confessions que de la botanique, de l’anatomie, des dernières découvertes scientifiques, en particulier de la thermodynamique, ont nourri autant son œuvre que ses conversations. « L’analogie galopante dévoile le même sous le différent , disait-il ».

Sa pensée dépassait les limites de la logique, pour tenter une convergence entre compréhensible et incompréhensible, rationnel et religieux, sciences dures et ésotérisme, poésie et logique.

Mais n’est-ce pas pour dépasser de telles oppositions que beaucoup d’artistes, en particulier parmi ceux qui se réclamaient de le théosophie er de l’anthroposophie au tournant de l’avant dernier siècle, ont ouvert de nouveaux horizons à la peinture ?

« Sa pensée était le foyer d’une transformation qui avait besoin d’échanges et de partages, autant pour se nourrir que pour s’essayer. Il soufflait je ne sais quelle insoumission en mêlant les vocabulaires contradictoires de la science moderne et de la tradition » (Bernard Noel).

Lunven avait la ferme conviction que le monde était soutenu par notre esprit de recherche et que la réalité s’effondrerait si nous ne la nourrissions pas avec la substance de nos pensées.

Il a pris les grandes décisions de sa vie en fonction de leur teneur poétique. À 20 ans, il séduit une belle Hélène plus jeune, en tombe amoureux, l’enlève, l’emmène à Moscou, avant de l’épouser quelques années plus tard.

Il partageait le désir de Rimbaud de fusionner pensée et vie. Les dernières années, il a cherché à se faire passer pour fou, mais ses amis n’y croyaient pas. Lui-même en plaisantait. Les vigiles de Sainte-Anne avaient fini par lui en refuser l’entrée.

Cela éclaire d’un jour nouveau l’après-midi où il distribué ses vêtements dans la rue. Il ne restera que quelques heures à Sainte-Anne, mais des heures fatales. Le psychiatre qui l’a reçu lui a administré des médicaments euphorisants, sans antidote. Il a bien prévenu les proches de François, mais trop tard.

A.M.

François Lunven, "Nimbe crucifère", circa 1968, Gravure aquatinte, 87 x 55,7 cm

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