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ANDRÉ DERAIN
André Malraux: « C’est Derain, le grand génie de ce siècle ».
Alberto Giacometti : « Derain est le peintre qui me passionne le plus, qui m’a le plus apporté et le plus appris depuis Cézanne. Il est pour moi le plus audacieux. Je veux affirmer mon immense admiration pour son œuvre et mon émotion devant elle.» Giacometti a été intéressé par toutes ses périodes, jusqu’à sa mort en 1954, et particulièrement, a-t-il pris le soin de préciser, la dernière.
Clément Greenberg, quoiqu’ardent défenseur de l’expressionnisme abstrait américain, a écrit en 1944 : « Les prouesses techniques de Derain ne sont pas seulement dues à l’habileté , elles sont si fortes et si enracinées qu’elles s’assimilent à certaines caractéristiques relevant en général du génie ».
Plus récemment, François Rouan a rédigé un petit livre, Mon cher André Derain (1995), hommage d’un peintre à un autre peintre, qui nous plonge au cœur de sa création et permet de mieux comprendre ses œuvres, jusqu’aux dernières.
Derain a beaucoup échangé, oralement et épistolairement, avec Matisse, Picasso, Apollinaire, Breton, Satie, Braque un ami proche jusqu’à sa mort. Il entretenait des relations amicales avec Giacometti et Balthus.
En 1936, Balthus peignit un impressionnant portrait de Derain, une de ses œuvres majeures.
L’importance de son œuvre fut longtemps incontestée, de ses premiers marchands, Henri Kahnweiller et Paul Guillaume, jusqu’à la mort de ce dernier en 1934. Par la suite, sa réputation s’est fortement dégradée , sauf pour les œuvres antérieures à 1914.
La raison invoquée : sa participation à la visite officielle, à l’automne 1941, sous l’Occupation, des artistes français en Allemagne. D’autres l’ont pourtant fait, parfois avec moins de circonstances atténuantes, sans sans être mis mis en quarantaine. Et les éloges d’un André Malraux , résistant et très proche du Général de Gaulle valent bien une réhabilitation.
La véritable cause de sa mise à l’écart et de son oubli dans l’histoire de l’art du XX ème siècle est son refus de la vision téléologique de l’art moderne, d’un « progrès » qui repose trop sur la mise à l’écart des prédécesseurs et rétrécit le champ de la peinture. Pour lui, l’originalité voulue était comme un masque de la banalité ou de l’impuissance.
Il est resté l’un des fauvistes qui nous touchent le plus, grâce non seulement à ses couleurs lumineuses mais aussi à leur profondeur inépuisable qui sourd lentement des œuvres de cette période, comme dans ses œuvres ultérieures.
Un tableau de Derain se distingue également par :
– son dialogue entre le sujet représenté et l’histoire de la peinture. Toute idée est aussi de tous les temps. Nous sommes contemporains de l’éternité.
– la fusion entre deux représentations, celle du sujet et celle du médium peinture, par exemple des cheveux qui peuvent se lire aussi comme des traces de pinceau ou l’artifice de masques-maquillages qui cachent et révèlent les aveux de la peau, la respiration du corps, ses désirs et sa vulnérabilité.
Son œuvre est solidement implanté dans son siècle. Son retour à une figuration plus classique après la guerre de 14-18 avait une raison existentielle au sortir de la première guerre mondiale : le traumatisme des corps et visages défigurés, souvent déchiquetés, de ses compagnons de tranchées. Ses meilleurs portraits et nus, beaux sans complaisance, font partie de ses œuvres les plus profondes. Des lignes épaisses, noires, soulignent et creusent des corps qui s’accordent au paysage environnant.
Comme beaucoup d’artistes de sa génération, Derain était féru de nouveautés technologiques – avions, voitures de sport – et attentif aux dernières découvertes scientifiques. La seule matière de la peinture, c’est la lumière. Faire de la lumière la matière de la peinture actuelle, voilà qui est en tout point conforme aux théories scientifiques les plus avancées. La lumière structure certains paysages sous la forme discrètement évoquée d’ampoules électriques/sous forme d’ampoules électriques discrètement évoquées.
Son œuvre s’inscrit également dans le paysage intellectuel du XXème siècle : la découverte de la philosophie de Nietzsche (l’art est dionysiaque, élan vers la joie, ivresse de l’esprit), l’élan vital de Bergson, les interrogations sartriennes de l’existentialisme, les mises en évidence de la phénoménologie. Toute idée doit résonner dans la chair.
Nous avons beaucoup à apprendre d’une redécouverte de l’œuvre de Derain.
2017-2018 André Derain, 1904-1914. La décennie radicale, Centre Pompidou, Paris
2017 Derain, Balthus. Giacometti. Une amitié artistique, Musée d’Art Moderne Paris, 2017
2007 André Derain, sculpteur et photographe, Musée de Beaux-Arts de Carcassonne
2003 Galerie Schmit, Paris
1995 Musée Despiau-Wlérick, Mont-de-Marsan
1994-95 André Derain, Le peintre du « trouble moderne », Musée d’art moderne de la ville de Paris
1994 Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, Paris
1991 Musée d’Art Moderne, Troyes
1991 Musée de l’Orangerie, Paris
1981-1982 Marcq-en-Baroeul
1952 – 1953 Modern French Masters, Columbus ed Akron, Ohio, Worchester, Massachusetts
1952 – 1953 Les Fauves, Museum of Modern Art, New York
1951 Galerie Roland Browse & Del Banco, London
1951 Le Fauvisme, Musée National d’Art Moderne, Paris
1951 Le Fauvisme, Musée des Beaux-Arts, Rennes
1950 David Finlay Galleries, New York
1950 Sidney Janis Gallery, New York
1949 Galerie de Berri, Paris
1947 Galerie Bing, Paris
1940 Pierre Matisse Gallery, New York
1937 Maîtres de l’Art Contemporain, Petit Palais
1916-34 Galerie Paul Guillaume
1916 Exposition personnelle du marchand d’art Paul Guillaume
1907- 24 Galerie Kahnweiller
1905 Salon d’Automne, Paris
1905 Salon des Indépendants, Paris