Le refus II/II

Fred Deux, « Le Refus », 1982, mine de plomb sur papier, 104 x 66 cm

Au dos du dessin que nous avons commenté mardi dernier, Fred Deux écrit :
« Il fallait que je cesse d’être un mélange en dépassement, toujours à écouter puisque inquiet de ces bruits où le tri était devenu impossible…
Je persisterai à servir de conduit, à recevoir et à tirer, à déposer, le mieux possible, sans excès de perte. Ce que je ne commettrai plus, c’est de faire passer des états pour des états, sans prendre le temps de dire assez. Cet état là n’est que le résultat d’une misère, d’une non-vue, d’états sans éclat, si « fantastiques » qu’ils soient et qui n’ont rien à faire ici avec ceux que j’ai laissé filer…
Si petite ait été mon erreur, elle trouble une eau qui n’est pas prête de retrouver sa transparence ».

Il craint que son imagination l’ait conduit parfois sur les chemins erronés des fantasmes ou du fantastique, des images sans réalité, celui de trop de néo-surréalistes. De la même façon que 10 ans auparavant il a voulu se casser la main sur du papier Japon rugueux, pour lutter contre les facilités de sa dextérité.

Ce sera toujours au prix d’un travail minutieux et très lent. « Ce serait facile si les terrains à traverser pouvaient l’être par utilisation de mots qui nous ferait faire quelques économie…»

Il va se définir désormais comme un guetteur, celui de toutes les manifestations de la vie de sa chair, du désir amoureux, de tout ce qu’il a pu observer, notamment chez les animaux, celui aussi de questionnements récurrents sur l’existence, la mémoire, la transmission, la survie…

« J’avais un espace où je ne savais « réaliser ». Je n’ai plus cet espace. Il a cédé la place à de grandes feuilles de papier ce qui, en sorte, réponds à une nouvelle attente. Délivré ou prisonnier à vie ? Attention ça pince dans ces mots ».

Dans la solitude de ses deux ateliers, il sera de plus en plus respectueux de la vie, en particulier, du corps amoureux de la femme, jusqu’à ses « fragments de l’homme merveilleux » de 2005 et son ouverture au monde par la couleur.

Nous avons édité, la même année 2005, gravé par Cécile Reims, un livre d’artiste sur ses dessins de 1973-75 au nom provocateur à l’époque de « spermes colorés ». Il a transformé le titre en « liqueur sacrée ». Celle qui crée, donne la vie.
A.M.

Fred Deux, « Les aspects de l’homme merveilleux », 2004, mine de plomb, aquarelle et peinture laque sur papier Arches, 76 x 57 cm

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