Jugements derniers
La vigueur des traits donne une extraordinaire énergie à cette peinture sur drap de Dado. Des corps vides flottent, isolés, autour d’une grande boule en explosion où se découvrent un, puis plusieurs visages, des ossements, comme un amoncèlement de corps disloqués qui crient et mettent en musique la douleur et la vie, sur le mode descendant ou ascendant des jugements derniers. Dado s’en cachait mais il était religieux. Et il aimait le baroque.
Il l’exprime dans ces dessins, colorés ou en noir et blanc, proches de la spontanéité des graffitis et d’une extrême rigueur.
La nuit, alors qu’il peignait sur les murs d’une cave viticole, un street-artiste recouvre son travail. Loin de s’en offusquer Dado, repeint à son tour. Le jeu se poursuit jusqu’à ce que le maître se cache, le démasque, et au lieu de se fâcher, l’emmène dans son atelier. Il lui apprend à composer et à disposer les œuvres.
Le jeune homme émerveillé venait me raconter tout cela, jusqu’au matin où il arrive hâve et négligé, avec un ami. « Comment allez-vous ? ». « Nous avons passé la nuit en prison, nous avons graphité le siège de la poste. » C’était éprouvant? » « Ce n’est pas cool ! »
Et ce court dialogue, quand Dado a transformé en quelques coups de pinceau un pan entier dans La Chapelle Saint-Luc à Gisors, « Miodrag , tu peins vite. » « Ça fait plusieurs jours que j’y pensais. »
A.M.
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